
Les romancières du siècle des Lumières ont été les premières à poser la question du bonheur au féminin de façon aussi stratégique. Les passages obligés de la féminité, tels que le mariage, la maternité et la vertu, sont-ils garants de bonheur ? Les femmes mises en scène peuvent-elles s'affranchir de l'idéal féminin façonné par l'ordre établi ? Peuvent-elles échapper à la culpabilité qui les presse de suivre fidèlement le chemin tracé pour elles ? Quels recours sont à leur disposition pour être heureuses ? C'est autour de ces questions, d'une troublante actualité, que les auteurs du XVIIIe siècle tracent le parcours de la destinée féminine, avec tous les détours, les obstacles et les enjeux qu'il peut comporter. Leur discours laisse surtout entendre que le bonheur n'est pas possible sans une remise en question des rôles et de la place des femmes dans la société.
Cet ouvrage rend compte d'une recherche sur l'oeuvre de Madame d'Epinay, contemporaine de Rousseau, Diderot, Duclos et Grimm, personnalités des arts et lettres que l'écrivain-philosophe mit en scène sous des noms d'emprunts. Cette écriture de soi au féminin, considérée comme subversive dans la forme et le fond, se classe comme oeuvre fondatrice de l'autobiographie féminine. Odette David consacre la majeure partie de son analyse à l'Histoire de Madame de Montbrilland, publiée une première fois sous forme réduite en 1818, puis dans son intégralité en 1951.
"Si vous deveniez auteur vous perdriez la bienveillance des femmes, l'appui des hommes, vous sortiriez de votre classe sans être admise dans la leur. Ils n'adopteront jamais une femme auteur à mérite égal, ils en seront plus jaloux que d'un homme. Ils ne nous permettront jamais de les égaler, ni dans les sciences, ni dans la littérature ; car, avec l'éducation que nous recevons, ce serait les surpasser." "Gouverneur" des enfants d'Orléans avant la Révolution, Caroline-Stéphanie-Félicité du Crest, comtesse de Genlis (1746-1830), est l'auteur d'une œuvre considérable, presque entièrement oubliée aujourd'hui à l'exception de ses célèbres Mémoires publiés en 1825. Dans La Femme auteur, nouvelle sentimentale parue sous l'Empire, elle met en garde les femmes qui souhaitent sortir de leur condition et devenir célèbres grâce à la littérature.
N'oubliez jamais, Sire, que c'est la faiblesse qui a mis la tête de Charles Ier sur le billot... Je souhaite que le temps ne me justifie pas. Quinze ans avant la chute de Louis XVI, Turgot est le premier — et longtemps le seul — à exposer, par écrit, au roi, les abîmes où celui-ci court. Mais il en va souvent ainsi des Cassandre : Turgot est connu des livres d'histoire pour sa disgrâce expéditive en mai 1776, après deux ans d'un ministère tronqué : il reste comme le rare exemple d'un intellectuel libéral, ayant compris le principe des rendements décroissants en agriculture, partisan de la liberté totale du commerce et capable, avant Adam Smith, de formuler les rudiments de la théorie de l'équilibre économique. Toutes choses qui indiffèrent les Français de 1770, et expliquent la mauvaise réputation de ce précurseur misanthrope. Jean-Pierre Poirier a repris l'ensemble des archives disponibles, pour brosser le portrait de ce visionnaire, ami des philosophes, coqueluche des salons de Paris, auteur d'un best-seller pourtant austère : Réflexions sur la formation et la distribution des richesses. Il montre comment l'intendant de Limoges transforme sa région en...
Cet ouvrage est une réédition numérique d’un livre paru au XXe siècle, désormais indisponible dans son format d’origine.
Extrait : "Lorsqu'on fait un conte, c'est à quelqu'un qui l'écoute ; et pour peu que le conte dure, il est rare que le conteur ne soit pas interrompu quelquefois par son auditeur. Voilà pourquoi j'ai introduit dans le récit qu'on va lire, et qui n'est pas un conte, ou qui est un mauvais conte, si vous vous en doutez, un personnage qui fasse à peu près le rôle du lecteur."