
Les Mémoires secrets assument toutes les fonctions que l’on attend d’un journal aujourd’hui : ils en ont l’abondance, l’exactitude et le style aigu qui saisit l’événement sur le vif et déchiffre toute l’actualité. En ce dernier quart du XVIIIe siècle, où l’on ne peut critiquer le gouvernement, le roi ou l’Église, ils abordent tous les sujets sans ambages. C’est un journal d’opposition qui se flatte de désigner tous les personnages officiels par leur nom sans dévoiler l’identité de ses rédacteurs, et par là, il s’agit bien de mémoires secrets. Ces journalistes sont passionnés de politique, de philosophie, de techniques nouvelles, de théâtre, de musique, de faits divers ... La grande affaire de cette période, c’est aussi Paris, qui rassemble tous les arts, qui voit naître toutes les inventions et propose un nouveau style de vie. Tout article s’inscrit dans une perspective politique, celle du parti patriote, donnant ainsi une réelle unité à cette riche chronique.
Un « impôt sur les imbéciles », une « friponnerie », un « jeu cruel », un « fléau inventé par le despotisme »... Les hommes des Lumières n'avaient pas de mots assez durs pour dénoncer la loterie royale, une institution que tous les Etats européens ont mis sur pied au XVIIIe siècle. Les souverains encourageaient donc la passion du jeu, l'oisiveté...
Le 11 septembre 1758, l’arrière-garde d’un corps expéditionnaire britannique est défaite sur la plage de Saint-Cast par des troupes françaises commandées par le duc d’Aiguillon. Cette bataille ne constitue en fait que l’ultime épisode d’une opération bien plus vaste, l’une des « descentes » sur les côtes de France mises sur pied par Army et Navy au cours de l’été 1758. Ce raid, débuté sous les meilleurs auspices le 4 septembre par un débarquement de vive force, opération presque routinière pour les forces britanniques qui la répètent pour la troisième fois en l’espace de quelques semaines, avait pour objectif Saint-Malo, l’un des principaux ports français. Il a cependant fallu au général Bligh abandonner cette perspective, les défenses de la ville mais aussi la météorologie contraignant ses troupes à rebrousser chemin et à gagner un point de rembarquement. Ce repli est d’ailleurs marqué par des opérations de « petite guerre » dans le bocage breton, exposant les Britanniques au harcèlement des milices gardes-côtes. C’est à l’étude de cette bataille atypique, « entre terre et mer » selon l’expression du chevalier de...
Le colloque qui s’est tenu à l’Université d’Artois, les 20 et 21 octobre 2010, a cherché à définir, à partir d’exemples européens les plus divers et sur la longue durée, la nature du lien entre ce qui est du domaine de la vie privée et ce qui est rendu public. Il a souligné l’interdépendance entre le support médiatique et la constitution de l’individu : par le livre et l’écrit, l’homme moderne a bâti son intériorité. Il a montré que les frontières entre le public et le privé sont fluctuantes, soumises aux impératifs, comme aux aléas de la politique, des querelles religieuses et de la volonté affirmée de certains individus de s’inventer des parcours biographiques singuliers, que les exemples du chansonnier Béranger, de l’ambassadeur Esterhazy et de Proust sont venus éclairer. Il a montré que les femmes ont une approche différente de celle des hommes, peut-être parce que leur éducation les pousse à mieux respecter les normes de civilité. Mais si l’espace curial a longtemps permis une expression féminine assez libre, la Révolution les a ensuite exclusivement cantonnées dans le domaine de la vie sentimentale. La publicité...
Les loisirs, ces temps et ces activités consacrées à la détente, aux divertissements et au développement personnel, sont devenus un objet d'études sociologiques, puis historiques depuis leur "découverte" en tant que fait social lors des Trente Glorieuses. Malgré un bel essor de ces études depuis quelques années, de nombreuses interrogations persistent, notamment en ce qui concerne les liens directs des loisirs avec les sociétés urbaines. Questions qui portent d'abord sur les rapports des loisirs à l'espace et aux rythmes du temps de la ville, sur les tentatives faites par les pouvoirs de les contrôler et codifier, voire de les interdire, et sur les transgressions de ces interdits... Questions qui portent ensuite sur les loisirs comme élément d'identité, comme facteur d'intégration et d'exclusion, comme vecteur de contestation... Questions qui portent finalement sur les pratiques qu'ils suscitent, sur leur fonction de distinction sociale, sur leur rôle dans la société dite de consommation... Un colloque international, tenu à l'Université François-Rabelais de Tours en mai 2003, a tenté de répondre à une partie de ces interrogations inhérentes à...
« Les bruits de Parlements ne sont plus de saison » : ainsi Colbert s’exprimait-il en 1679 et, depuis cette époque, les historiens, ont, comme en écho, repris l’idée que ces hautes cours de justice qui se disaient « souveraines » avaient été soumises et réduites à l’obéissance et au silence par Louis XIV, incarnation d’un absolutisme triomphant et centralisateur. Or depuis quelques années, cette vision d’un pouvoir royal s’imposant de façon autoritaire et unilatérale a été discutée et, aujourd’hui, la notion même d’absolutisme est en débat. Peut-on dès lors relire l’histoire des parlements sous Louis XIV à la lumière de ces nouvelles interrogations, ou bien faut-il considérer que Colbert, tout bien pesé, avait bel et bien raison ? À travers les questions aussi diverses que le maintien de l’ordre, les remontrances, la politique anti-protestante, la présence des jansénistes, les relations avec les autres institutions, les historiens et historiens du droit rassemblés à Rennes en novembre 2008 offrent ici quelques pistes afin de tenter une relecture d’un chapitre longtemps négligé de l’histoire des parlements.
N'oubliez jamais, Sire, que c'est la faiblesse qui a mis la tête de Charles Ier sur le billot... Je souhaite que le temps ne me justifie pas. Quinze ans avant la chute de Louis XVI, Turgot est le premier — et longtemps le seul — à exposer, par écrit, au roi, les abîmes où celui-ci court. Mais il en va souvent ainsi des Cassandre : Turgot est connu des livres d'histoire pour sa disgrâce expéditive en mai 1776, après deux ans d'un ministère tronqué : il reste comme le rare exemple d'un intellectuel libéral, ayant compris le principe des rendements décroissants en agriculture, partisan de la liberté totale du commerce et capable, avant Adam Smith, de formuler les rudiments de la théorie de l'équilibre économique. Toutes choses qui indiffèrent les Français de 1770, et expliquent la mauvaise réputation de ce précurseur misanthrope. Jean-Pierre Poirier a repris l'ensemble des archives disponibles, pour brosser le portrait de ce visionnaire, ami des philosophes, coqueluche des salons de Paris, auteur d'un best-seller pourtant austère : Réflexions sur la formation et la distribution des richesses. Il montre comment l'intendant de Limoges transforme sa région en...
Juillet 1978