
La Garde nationale, surgie pendant l'été 1789, s'est développée dans l'ensemble du territoire français jusqu'à l'apothéose de la Fédération nationale du 14 juillet 1790, triomphe de 3 millions de citoyens en armes. Ce moment est resté dans notre imaginaire collectif comme le symbole éclatant d'une Nation se donnant à elle-même le spectacle de sa force, en un élan unanime. L'image mythique de cette communion a perduré, associant mécaniquement Garde nationale et Révolution, favorisant une sorte d'amnésie historiographique que le Bicentenaire n'a pas combattue. Les chercheurs réunis à Rennes ont tenté d'inscrire la Garde nationale dans la durée de l'institution (de la milice urbaine à 1789-1871), dans l'espace national, en posant des questions toujours en suspens : force de l'ordre ou de contestation ?, garde « bourgeoise » ou force « démocratique » ?, organisation locale ou nationale ?, réserve militaire ou expression armée de la citoyenneté ?, tremplin politique ou marqueur social ? Le mythe a longtemps fasciné les historiens. Au fil des journées révolutionnaires, la prise d'armes, l'insurrection sont devenues, plus que l'exercice du droit de vote...
Le plus méconnu et le plus mal aimé de grands de la Révolution : Georges Couthon mena d’une main d’acier (avec Robespierre et Saint Just) la France de l’An II. Il en exprima aussi d’une langue de velours les vastes états d’âme. Surnommé « avocat des pauvres », il fut déchiré par une infirmité qui le contraignait à se faire porter et écarter entre la modération et la Terreur. Pour se couler au plus près du héros, l’auteur fait conter le récit par la romantique jeune fille que Couthon épousa, malgré l’opposition de leurs familles. Appuyée sur une recherche inédite, l’écriture romanesque creuse profond la vérité du personnage, la réincarne parmi les événements et joue le jeu de lui faire revivre les idées qui ébranlent alors le monde.
En mars 1789, Pierre-François Lepoutre, fermier à Linselles, est élu député de la gouvernance de Lille aux États généraux ; son élection constitue en elle-même un épisode révélateur de la dynamique politique dans laquelle la France est engagée. Notre paysan croyait sans doute rester quelques semaines à Versailles ; en fait, membre de l’Assemblée devenue nationale constituante, il séjourne au cœur de la France en révolution et reste deux ans et demi loin de la ferme des Wattines que dirige son épouse, Angélique Lepoutre-Delputte. Ainsi séparé, le couple échange près de 500 lettres. Ce volume restitue fidèlement la majeure partie de cette correspondance exceptionnelle. Elle constitue une évocation très concrète de l’histoire générale de la Révolution tout en fourmillant de notations sur les préoccupations quotidiennes des députés. Mais cette correspondance à double sens permet aussi d’appréhender l’indéniable mise en mouvement des provinces par l’événement révolutionnaire. On perçoit bien la complexité des adhésions et des refus à l’égard du changement en cours, l’enchevêtrement des espoirs et des inquiétudes dans les...
Dieu est mort ? Les convulsions de son cadavre font chaque jour l'actualité. Sommes-nous sortis de la religion ? Les cartes militaires des guerres en cours montrent l'inverse. Connaissons-nous un choc des civilisations ? La théorie dit non, le sentiment d
La Contre-Révolution possède une existence historiographique paradoxale. Si elle est citée comme une menace constante et une force dangereuse, elle n'est présentée que sous une forme fragmentée, assemblant pêle-mêle les nobles de l'émigration, les penseurs militants, avec les ruraux de l'Ouest ou du Midi, les Viva Maria italiens et les paysans belges, à qui sont adjoints les pays européens entrés en guerre – l'Angleterre de Pitt en tête. Omniprésente dans l'ombre mais souvent absente du discours historique, la Contre-Révolution reste mal connue. Depuis une vingtaine d'années, l'histoire scientifique reprend cette question à nouveaux frais. C'est l'objet de ces pages que de proposer, modestement, à la fois un premier bilan des travaux récents et des pistes de recherches. Sans postuler l'existence d'une quelconque unité de la Contre-Révolution, cette rencontre entre des historiens européens brosse le tableau de cette réalité politique et sociale complexe, et montre la Contre-Révolution à la fois puissante et faible, essentielle et marginale. Elle met en valeur l'hétérogénéité des chronologies qui existent dans les différents pays, ceci expliquant la ...
Qu'il s’agisse des biographies, des vastes enquêtes sur la vente des biens nationaux, sur l’émigration, sur la noblesse du Sud-Ouest, sur l’École royale militaire d’Effiat, sur les camps de Jalès – on en passe –, les travaux récents sur le deuxième ordre de la France d’Ancien Régime invitent à la fois à réinterroger son rapport à la Révolution et à l’Europe contemporaine des évènements français et à tenter une synthèse d’histoire sociopolitique. Les années 1770 voient se transformer une sociabilité nobiliaire construite autour des Lumières ou des anti-Lumières, marquée par la recherche d’une reconnaissance intellectuelle qui se traduit dans la fréquentation des salons ou l’accumulation des livres, des collections, décennie également parcourue par une réaction d’un ordre, très divers d’une province à l’autre, se repliant pour partie sur ses privilèges, notamment militaires, révisant ses terriers et ses droits féodaux. La fondation par Napoléon d’une noblesse impériale bouleverse un peu plus les rapports de ceux qui peuvent justifier depuis plusieurs générations de leur sang bleu au pouvoir et à la société issus de ...