Diderot et le matérialisme
Auteure: Jean-Claude Bourdin
Nombre de pages: 128La singularité du matérialisme de Diderot ne réside pas tant dans l'idée que la sensibilité est une propriété générale de la matière, que dans le caractère inachevé et vraisemblablement interminable de sa pensée philosophique. Consigné dans des textes où il est l'objet d'une mise en scène et d'une mise en écriture, le matérialisme chez Diderot n'est jamais exposé sous la forme d'un traité ni ne semble dépendre de principes explicitement énoncés. Pourtant, l'auteur des Pensées sur l'interprétation de la nature semble soucieux de faire accréditer ses affirmations par les sciences de son temps (physiologie, médecine, chimie, etc.) et de vouloir confier aux savoirs positifs le soin d'achever la métaphysique la plus hardie. Mais, contrairement à ce qui est souvent avancé, ce recours aux sciences ne confère pas au matérialisme diderotien une allure, ni même une prétention scientifiques. Les sciences sont bien plutôt exploitées pour leurs ressources en images, métaphores, analogies, etc., étant mises au service d'un matérialisme ouvertement conjectural, relevant de l'imagination, seule adéquate à s'ouvrir à la possibilité des choses. Se limitant ...